Il ne s'agit pas d'un livre nouveau au sens de récent mais d'un ouvrage que j'ai découvert il y a peu et à ajouter à la longue liste des livres relatifs à la sculpture et à l'art animalier (cf. l'album photo "Les livres", où vous retrouverez des dizaines de références).
Ce livre peu épais (112 pages) a été écrit un an seulement après la mort d'Antoine-Louis Barye et il est fort intéressant d'avoir un témoignage de la façon dont le grand sculpteur était perçu de son vivant ou juste après sa disparition.
L'auteur, Arsène Alexandre, montre avant tout les difficultés considérables qu'eut à connaître l'artiste, rejeté par les critiques, ignoré par le jury du Salon, peu apprécié des autorités officielles de l'époque alors qu'il jouissait des faveurs du public. J'ai cité récemment, dans ma note relative à l'Aigle, les déconvenues de Barye quant aux commandes publiques qui lui auraient permis de sortir de la quasi-misère dans laquelle il vivait : ce livre cite bien d'autres exemples de mesquineries, jalousies et ignorances des milieux artistiques du XIXème vis-à-vis de Barye.
Extrait :
"Lorsqu'il [Barye] eut réussi, par une succession d'envois éclatants [au Salon], à exaspérer ceux dont tout le mérite consiste à introduire dans l'art les moeurs de la politique, le sculpteur se vit enfin infliger l'insulte d'un refus au Salon. Dès lors, on se plut à exercer plus d'une fois contre lui des tristes représailles.
Or, comme un jour, après la nouvelle d'une exécution de ce genre, Barye se promenait en méditant sur la bonne foi, il rencontra le grand paysagiste Jules Dupré. Celui-ci lui demanda avec intérêt des nouvelles de ses travaux : "Cela va fort bien, répondit Barye ; je suis refusé." Et comme l'honnêteté de Dupré se récriait : "Mais c'est tout naturel, reprit-il avec cette sarcastique tranquillité qui commençait à murer son visage, je compte trop d'amis dans le jury."
On voit que Barye était lucide sur la jalousie des hommes...
Ce livre est remarquablement écrit, dans un style impeccable que l'on ne trouve plus guère aujourd'hui (sauf peut-être dans le très beau "Ce qu'il advint du sauvage blanc", de François Garde, paru début 2012 chez Gallimard). Il est accompagné de 32 gravures mais qui présentent peu d'intérêt.
Ce livre se trouve assez facilement sur les sites internet des bouquinistes.
"A.L. BARYE" - Arsène Alexandre - Collection "Les Artistes célèbres" - Librairie de l'art - 1889 - 112 p.